Pour la 4e fois, Overjoyed était présent au 11e Forum Entreprendre dans la Culture organisé par le Ministère de la Culture à l’École nationale supérieure d’architecture de Paris-Belleville. Marie-Pierre Bourdier, fondatrice du Collectif, y a animé le mardi 1er juillet une conférence sur le thème : « Nouvelles tendances de la communication dans le spectacle vivant », alors que les lieux de culture et de spectacles présentaient leurs nouvelles saisons. Voici un résumé de notre étude qualitative sur les tendances du secteur en matière d’identité visuelle, de contenus et d’outils pour répondre aux enjeux de communication 2025.
Des tendances… qui suivent des tendances : 2 exemples
1. La bataille de l’attention : aller vers l’essentiel
Comme le souligne Olivier Lefebvre (FRED & FARID Paris) :
“Avec la bataille de l’attention, il faut aller à l’essentiel. De plus en plus, on voit des campagnes ultra simples : un fond de couleur, une phrase, un packshot, un logo.”
Dans un contexte où les publics sont saturés d’informations, la simplicité devient une stratégie de différenciation. Les identités visuelles se recentrent sur des compositions claires, sobres et immédiatement lisibles. Les campagnes privilégient les formats courts et percutants, inspirés des codes des réseaux sociaux : titres impactants, couleurs franches, typographies lisibles, logos épurés.
Cette tendance répond directement à la logique des algorithmes et des flux d’attention : un message trop complexe se perd, tandis qu’une image forte et minimale capte immédiatement le regard. Elle influence non seulement la communication digitale, mais aussi l’affichage urbain, la presse et même la télévision.
Cette tendance au dépouillement ne signifie pas pour autant appauvrissement créatif. Au contraire, elle exige une maîtrise technique accrue et une capacité à synthétiser l’essence d’un message en quelques éléments visuels seulement :
« Un regain de créativité et une personnalisation accrue face à une homogénéité potentiellement générée par les machines, l’originalité et l’inspiration auront plus que jamais leur place.”
Dans un univers visuel où l’IA risque de standardiser les productions graphiques, l’originalité, la signature artistique et l’identité propre des lieux de spectacles deviennent des atouts stratégiques. Minimalisme ne doit pas rimer avec uniformité : il s’agit d’affirmer une personnalité forte, même dans la sobriété.

2. La nature et le vivant : retour aux sources, voire antidote
En parallèle, une autre tendance traverse les identités visuelles : celle d’un retour au vivant et à la connexion avec la nature. Ce mouvement, amorcé sur les réseaux sociaux, s’amplifie dans le design graphique des lieux culturels et de spectacles.
Les visuels intègrent de plus en plus des motifs organiques : feuillages, textures minérales, formes fluides inspirées du monde végétal et animal. Les palettes de couleurs s’adoucissent, se rapprochent des tons naturels : verts mousse, beiges sable, bleus profonds, ocres sables. Les compositions privilégient l’espace et la respiration, comme le reflet d’une quête de simplicité et d’authenticité.
Cette esthétique s’inscrit dans un imaginaire collectif où la nature devient refuge et source d’inspiration. Elle offre à la fois un contrepoint apaisant à l’hyperconnexion numérique et reflète une aspiration à un équilibre perdu entre l’humain, le vivant et la technologie. Dans le contexte de 2025/2026, marqué par les débats sur l’impact écologique des activités humaines, dont culturelles, ces codes visuels contribuent aussi à positionner les lieux de spectacles comme des acteurs responsables, proches des enjeux environnementaux, tout en soulignant l’aspect sensible et engagé de leur programmation.


La fin du 4e mur : le public devient acteur·ices
La fin du 4ᵉ mur ne se joue pas seulement sur scène : elle s’exprime dans la manière dont les lieux de spectacles conçoivent leur identité visuelle :
- Identités graphiques flexibles et interactives (effets de mouvement, textures sensorielles, compositions dynamiques, évolution selon les saisons de l’année…)
- Participation et l’appropriation par les publics (portraits réels, incarnation du projet en coulisse…)
- Cohérence esthétique forte pour ne pas se diluer dans la multitude des contenus.

L’humour et l’ironie

Les institutions culturelles n’hésitent plus à détourner les codes publicitaires ou les slogans populaires pour mieux capter l’attention. Les affiches jouent sur l’ironie : une citation de Molière est immédiatement « corrigée » par le TNBA, ou encore une invitation à emmener ses enfants au musée qui s’accompagne d’un clin d’œil à la saga Fast & Furious.
Même l’identité visuelle se prête au jeu, transformant le sigle « tnba » en un long cri de surprise ou de joie. Ces stratégies rappellent que la culture sait rire d’elle-même, tout en rendant ses messages plus accessibles et mémorables.
Le renouveau de la critique à l’aune de l’influence
En 2025/2026, les créateur·rices de contenus ne sont plus de « simples relais » : ils s’affirment comme des partenaires stratégiques en devenant « passeurs d’émotions » et influent directement les identités visuelles des lieux de spectacles :
- Formats et les esthétiques des plateformes (snack content) sans renier leur singularité.
- Collaborations créatives pour enrichir leur univers visuel.
- Identité vivante, modulaire et interactive, capable de dialoguer avec les codes des communautés en ligne.

Une diversification des contenus vidéos
La vidéo reste pour l’heure le format roi dans la communication en général. Portée par les réseaux sociaux, les plateformes de streaming et l’évolution des usages, elle devient un territoire central d’expression visuelle et un vecteur puissant d’identité. Au-delà de la simple captation ou de la conception de teasers / trailers, les institutions culturelles explorent désormais une diversité de formats, de récits et de points de vue. L’objectif : créer des passerelles entre artistes, directeur·rices, publics et communautés numériques.
- Cross-posting entre artistes et/ou directeur·ices de CCN
- Valorisation des projets d’autrui
- Format reels qui s’adresse directement aux abonné·es
- Impact plus fort, sur plusieurs communautés
- Ton chaleureux
Une monétisation et/ou sponsorisation des contenus digitaux : un potentiel encore sous-exploité dans le spectacle vivant
Pourtant, si la production de vidéos, d’images et de campagnes interactives s’intensifie, la monétisation et la sponsorisation restent encore timidement utilisées par de nombreuses structures culturelles.
Les plateformes offrent pourtant aujourd’hui des outils puissants pour transformer le contenu en levier d’activation commerciale : vente de billets, augmentation de la notoriété, fidélisation des publics et même financement direct des projets artistiques. Mais pour beaucoup d’institutions, la stratégie reste encore fragmentée et le retour sur investissement (ROI) mal mesuré.
- Le contenu comme levier d’activation commerciale (vente de billets, notoriété…)
- Des plateformes valorisant le contenu créatif : YouTube, Tipee, Patreon, HelloAsso… + Facebook (étoiles, bonus pour créateurs performants, vente via Instagram…)
- Une approche timide de Meta Business Suite : peu de budget investi, ROI mal mesuré, peu de tracking efficace de ventes de billets

En bref
La communication constitue aujourd’hui un enjeu stratégique majeur pour les organisations culturelles. Elle ne se limite plus à la promotion d’un événement, mais participe pleinement à la construction de l’identité et de la visibilité des structures. Dans ce contexte, oser la différenciation créative devient indispensable : proposer des contenus originaux, expérimenter de nouvelles formes narratives et visuelles, et créer des expériences permet de se démarquer dans un paysage culturel bien rempli.
La mutualisation des actions de communication apparaît également comme une tendance forte. Des initiatives collectives, telles que Tous·tes debout pour la culture, démontrent l’efficacité de la coopération entre acteurs du spectacle vivant. Après six mois d’activité, le bilan est révélateur : plus de 1 000 publications ont été diffusées, des milliers de comptes se sont engagés, et artistes, publics et institutions ont participé activement à la dynamique.
Enfin, le passage de la catégorisation à la personnalisation s’impose comme une orientation incontournable. Il ne s’agit plus de diffuser des messages génériques à des audiences larges, mais de concevoir des contenus adaptés aux attentes et aux comportements des publics. Identifier les profils, comprendre les centres d’intérêt et créer des parcours de communication individualisés permet d’établir des liens plus forts et plus durables avec les spectateur·ices.
Sources :
Bouchaud, N. (2025, 28 juin). Culture : le public n’est pas une part de marché. Libération. https://www.liberation.fr/idees-et-debats/tribunes/culture-le-public-nest-pas-une-part-de-marche-par-nicolas-bouchaud-20250628_G7GCK62HFJDHXICU7WU7IXFFVQ/
C., É. (2025, 23 janvier). Les 6 tendances de la création publicitaire en 2025. La Réclame. https://lareclame.fr/tendances-creation-publicitaire-2025-309195