Confinement 3 : les enjeux de la communication

Par Collectif Overjoyed

Nous, structures, compagnies, artistes, indépendant·e·s, rêvons d’ouverture (#onouvre). Si notre attente est grande, comment jauger celle de nos publics ? Dans la relation à distance que nous avons maintenue, nous avons surtout témoigné d’un imaginaire toujours en route dans nos structures, au travail avec les artistes, prêt à accueillir les publics dès que possible. Et les publics, qu’en est-il de leur envie ? Intacte sans doute, mais malmenée par des incertitudes de calendrier et des inquiétudes sanitaires. À l’heure où l’on rêve d’été et de plein air, de septembre et de vaccins pour tou·te·s, quels sont les messages à mettre en œuvre ? Plusieurs discours ont cours, présents dans les médias, sur les réseaux : rassurant et, coûte que coûte, “l’ouverture aura lieu” ; engagé et solidaire “déconfinons un secteur d’activité essentiel” ; revendicatif et appelant au collectif “occupons les lieux de théâtre pour mieux les retrouver” ; attentiste et prévoyant “ouvrons à temps et avec prudence”. Le public qui a connu report et remboursement, voire a consenti le don, qui observe par la petite fenêtre virale tous les cadeaux des artistes en attente, qui en tant que citoyen attend des preuves et des feux verts, souffrirait d’un demi-ton et réclame que nous en disions plus. Non ? Quelques conseils et outils, à mixer à l’envi(e), pour anticiper nos retrouvailles avec les publics : Option “QCM” : mener une enquête auprès des publics pour évaluer l’état d’esprit des spectateur·ice·s, leur envie (réelle – et non seulement affichée, en solidarité, sur les réseaux sociaux) de retourner au spectacle. Évaluer leur attente en fonction aussi de leur proximité avec votre projet via des questionnaires ciblés auprès des abonnés fidèles, les spectateurs occasionnels, les publics de proximité, les communautés diverses (éducatives, associatives…) Option “team building” : communiquer en interne pour maintenir le feu, la foi, l’envie… Souder les équipes, dont certaines ont peut-être été en télétravail ou chômage partiel. De l’importance de la com interne.  Option “on vous dit tout” : préparer la reprise avec une communication très concrète et rassurante. Être transparent dans les informations concernant les règles d’hygiène internes au théâtre, mais aussi la situation sanitaire dans le secteur (relayer chiffres, études). Mettre en place une signalétique stricte et adaptée, déclinée sur tous les outils de com dont site, réseaux sociaux, etc. Option “faire avec vous” : renforcer les mécaniques participatives pour des ambassadeurs spectateurs convaincus et convaincants. Option “innover dans son discours” : innover en communication, pas seulement en investissant de nouveaux canaux (TikTok et autres), mais en repensant profondément la façon dont on s’adresse aux publics, à ses cultures plurielles. Besoin d’accompagnement pour traiter ces problématiques ?

Brochure or not brochure ?

Par Céline Allais

Au fil de nos échanges avec les professionnel·le·s de la communication culturelle, la question du print se pose régulièrement. Particulièrement en cette période d’incertitude qui, depuis un an, bouscule les programmes et les plannings et, par conséquent, l’un des principaux outils de communication d’un lieu de spectacles : la fameuse brochure de saison. Le digital, l’avenir du print ? Quel avenir pour les programmes imprimés ? Ce qui était la norme il y a encore quelques mois semble aujourd’hui obsolète. Collecte des informations, rédaction des textes, mise en page, relecture, impression et façonnage en amont (en général en mai, pour une nouvelle saison débutant en septembre)… Le digital est devenu, plus que jamais avec le premier confinement, “the place to be” pour communiquer en temps réel et au fil des annonces. Pour être présent même en l’absence d’événements et maintenir le lien avec les publics. La révolution numérique dans laquelle étaient entrés progressivement les théâtres via la billetterie en ligne, la publicité dynamique et les réseaux sociaux, s’est accélérée presque malgré eux. Et relance les interrogations sur la pertinence des modes traditionnels de communication. Faut-il y voir une agonie annoncée du print ? “[Le programme de saison], qui donne le ton de toute la saison, mobilise encore beaucoup de lieux. Nous ne pouvons pas encore nous en passer, même si la crise va probablement modifier les choses.” Laura Mary, responsable de la Communication et des Relations avec le public à l’Ecam (Espace Culturel André Malraux) – Théâtre du Kremlin-Bicêtre “En premier, ça reste le print. Ça va peut-être changer, pour s’adapter à de nouveaux usages et à la montée en puissance des outils numériques.”  Amandine Ligen, responsable Communication et Mécénat de l’IAC Institut d’Art Contemporain de Villeurbanne “On imprime un peu moins de brochures papier chaque année, mais on en fait toujours. Sur cette saison, entre les incertitudes et les possibles annulations, je ne suis pas sûre que le papier tienne le coup, mais à voir.” Audiane Plagiau, directrice de la communication du Centre Dramatique National Nanterre-Amandiers La brochure imprimée, un rendez-vous annuel Le print a toutefois encore toute sa place dans la communication d’un lieu culturel, particulièrement un théâtre. La brochure est en soi une forme de rendez-vous annuel, à l’instar d’une présentation de saison en présence des équipes et artistes. Un outil physique rassurant, de lien fort pour des communautés proches : institutionnels, artistes et bien sûr public. Un espace concret pour se (re)présenter, redonner des nouvelles. Une feuille de route et de rêve pour l’année à venir. Que l’on retiendra d’autant plus qu’elle aura été imprimée et non pas noyée au milieu de l’infobésité numérique. Le print, support créatif et d’innovation Dans cette période où tout le monde tente de reproduire les mêmes recettes à succès sur le web, très dépendant des modes et des tendances, le print peut paradoxalement contribuer à se différencier. Il redevient une opportunité d’affirmer sa personnalité en osant innover.Certains lieux proposent ainsi un format revue, telle la Comédie de Reims, qui fait de sa brochure un média à part entière avec des contenus produits par des auteurs, des pigistes. Le Château de La Roche Guyon édite quant à lui un journal semestriel qui présente sa saison sous forme de portraits, interviews, reportages en coulisses…D’autres optent pour un objet esthétisant, comme la Commune d’Aubervilliers, à mi-chemin entre le programme et le catalogue d’art contemporain avec, d’entrée de jeu, des photos pleine page sans texte. Ou le Théâtre des Célestins de Lyon dont les visuels très travaillés (photomontages, dessins néo surréalistes en 2020-2021), oscillent entre l’onirique et l’étrange. Dans ces sillages, pourquoi ne pas envisager la brochure comme un objet représentatif de la créativité du lieu, voire de luxe ou collector ? En s’appuyant aussi sur les innovations développées par le secteur de l’imprimerie, en termes de textures, de pliages, de découpes personnalisées, de complémentarité avec le numérique ? Pourquoi ne pas solliciter la communauté de spectateurs pour faire de cette brochure non seulement un lieu ressource mais aussi un lieu de rencontre, de rassemblement, de cohésion ? Car ce que la crise nous confirme, c’est notre désir à tous de lien. La force et la chaleur du papier traversent les âges, les crises et les avancées technologiques parce qu’elles nous rappellent ce lien. La brochure de saison, par le toucher qu’elle implique, sa “sensualité”, est au fond le trait d’union parfait entre ces deux entités “vivantes” : le spectacle et le spectateur. L’enjeu pour les lieux culturels est donc de trouver le juste équilibre entre le print et le digital, en fonction des circonstances, sans abandonner l’un pour l’autre, mais en se servant de l’un pour magnifier l’autre. Overjoyed peut vous accompagner dans votre réflexion sur vos outils de communication.